Dans la Turquie de la Deuxième Guerre Mondiale, la loi de l'impôt sur la fortune, qui avait pour but d'imposer les revenus excessifs que les commerçants et les industriels avaient perçus sur les terrains du marché noir et de la spéculation, allait s'appliquer d'une manière discriminatoire et arbitraire aux minorités. La commission qui devait faire appliquer la loi, en ayant soin de procéder à une discrimination entre les contribuables musulmans et non-musulmans, allait en effet finir par exiger le règlement de sommes beaucoup plus importantes aux imposés non-musulmans qu'aux musulmans. Les contribuables non-musulmans ne pouvant pas payer les sommes demandées, qui représentaient une portion astronomique de leur patrimoine exigée de manière infondée, devaient alors honorer leur dette envers l'État turc en trimant dans des camps de travaux forcés. La loi de l'impôt sur la fortune allait également être appliquée d'une manière injuste et arbitraire aux commerçants non-musulmans de nationalité étrangère résidant en Turquie. La mise en application de cette loi dans ses conséquences sur les citoyens turcs non-musulmans a fait l'objet de plusieurs études par le passé; la façon dont cet impôt s'est appliqué pour les commerçants non-musulmans de nationalité étrangère n'avait cependant jamais été analysée. Ce livre étudie pour la première fois comment on a appliqué cette loi aux ressortissants de nationalités étrangères à la lumière des documents d'archive suisses, français, allemands et italiens.